Présentation

Pour ce premier hors-série de L’Écran traduit, qui suit de près la parution du numéro inaugural de notre revue au début de 2013, nous sommes très heureux de reproduire Le Sous-titrage de films de Simon Laks, initialement publié en 1957 à compte d’auteur et, à notre connaissance, très peu diffusé.

Il peut paraître surprenant de reproduire un ouvrage consacré au sous-titrage tel qu’on le pratiquait il y a plus d’un demi-siècle. On peut en effet se demander ce qu’il y a de commun entre les pratiques techniques et de traduction de la fin des années 1950 et celles d’aujourd’hui. Quand Simon Laks exerçait son métier d’adaptateur, le sous-titrage se pratiquait sur pellicule et les adaptateurs voyaient le film à traduire rarement plus d’une fois, sur une table de montage dont l’écran réduit était d’une faible luminosité et dont le système sonore ne facilitait pas toujours l’audition claire de certaines répliques.

Les adaptateurs d’aujourd’hui travaillent avec des outils qui leur permettent de revoir et réentendre autant de fois qu’ils le désirent une réplique, une scène, un film tout entier. Ces outils leur offrent généralement une bonne qualité d’image et de reproduction sonore ; grâce aux logiciels de traitement de texte et de sous-titrage, ils peuvent se concentrer sur le contenu « littéraire » des sous-titres, pour reprendre le qualificatif de Simon Laks.

Né en 1901 à Varsovie, Simon Laks était avant tout compositeur de musique1 Arrivé à Paris en 1926, il gagna d’abord sa vie en donnant des leçons de violon et en accompagnant des films muets. Il devait, par la suite, composer des musiques pour le cinéma. Déporté à Pithiviers, puis à Auschwitz, pendant la Seconde Guerre mondiale, c’est surtout après son retour de captivité qu’il se consacra au sous-titrage, ainsi qu’au doublage. Il a signé ou co-signé les adaptations de films allemands, anglophones et hispanophones, principalement entre 1948 et 1962, parmi lesquels Cinquième colonne (Saboteur, Alfred Hitchcock, 1942), Les Assassins sont parmi nous (Die Mörder sind unter uns, Wolfgang Staudte, 1948), Le Révolté de Santa-Cruz (El rebozo de Soledad, Roberto Gavaldon, 1952) et Héros de guerre (War Hero, Burt Topper, 1958). Il est mort à Paris en 1983.

Les grands principes du sous-titrage décrits par Simon Laks en 1957, ainsi que certains détails cruciaux de l’adaptation sous-titrée, restent plus que jamais d’actualité pour les adaptateurs des années 2010. Toujours clair et concret, cet ouvrage n’est jamais théorique. Son auteur passe en revue toutes les situations possibles, témoignage d’une grande pratique. Ses réflexions demeurent d’une justesse absolue, qu’il s’agisse de l’importance de réaliser le repérage avant la traduction, pratique qui n’était pas encore entrée totalement dans les mœurs à cette époque (voir § 6-7) ; de la nécessité d’utiliser la totalité des caractères disponibles pour obtenir un sous-titre au temps de lecture équilibré (§ 79) ; de sa finesse d’analyse du statut du son (in, hors champ ou off), mis en évidence par le sous-titrage, et des choix qui s’offrent en conséquence à l’adaptateur (§ 98-99) ; ou encore du sous-titre comme texte potentiellement jouable par un comédien (§ 106).

Pareilles réflexions font du Sous-titrage de films bien davantage qu’un précis technique, tant son auteur y fait la preuve qu’il a tout saisi des effets du sous-titrage sur la dimension esthétique d’un film et sur sa perception par le spectateur.

Outre l’intérêt historique de reproduire cet ouvrage, c’est pour cet éclairage finement argumenté sur le sous-titrage et pour sa justesse d’analyse qu’il a nous paru utile d’en faciliter la consultation en l’accueillant dans notre revue. Ce texte est aussi un outil précieux pour apprendre à distinguer une adaptation sous-titrée réussie de ce qu’on fait parfois passer pour quelque chose qui n’a de « sous-titrage » que le nom.

Nous reproduisons ce texte tel qu’il fut publié en 1957, à l’exception de la correction de quelques fautes de frappe et de l’adaptation de la ponctuation aux usages d’aujourd’hui. Nous avons ajouté un bref appareil de notes destinées à éclairer le lecteur sur des termes ou des usages peu courants actuellement ou disparus. Une version scannée de l’ouvrage d’origine peut également être téléchargée ici en .pdf.

La reproduction sous forme numérique du livre de Simon Laks, ainsi que sa mise en ligne, ont été effectuées avec l’accord et le soutien d’André Laks, fils de l’auteur et unique ayant-droit de l’ouvrage. Nous le remercions très chaleureusement.

Écran Traduit HS N°1 Article suivant